08/04/2016
« Le maçon rectifié, conscient de l’enseignement dont il est le dépositaire, célèbre le sacerdoce primitif d’Adam, en vrai prêtre, élu de l’Éternel, incorporé au sein de la Milice céleste. »
A propos d’une communication donnée le 18 mars 2016 au Cercle Willermoz de Marseille, sur le thème :
« Martinès de Pasqually &
Jean-Baptiste Willermoz : histoire d’un lien initiatique à l’origine du R.E.R. »
(Jean-Marc Vivenza)
Une saine et honnête compréhension des bases sur lesquelles la Réforme maçonnique de Lyon (1778) a été édifiée : telle est la précieuse contribution du Cercle Willermoz (CWJB) de Marseille, qui, œuvrant dans ce sens, et dans le cadre d’un cycle d’études & de conférences publiques particulièrement suivies, est à l’origine d’une communication de Jean-Marc Vivenza portant, précisément, sur la nature du lien spirituel entre le fondateur du Régime, et l’héritage de Martinès de Pasqually.
Quelles en furent les grandes lignes théoriques ?
La Réforme est l’expression christianisée – au sein des « Élus Coëns » et lors des « leçons de Lyon », qui en sont, de 1774 à 1776, le séminaire préparatoire – de la « doctrine de la réintégration ». Elle trouvera son cadre d’expression maçonnique et chevaleresque, dans la structure des établissements français de la « Stricte Observance » allemande, dont les provinces dites « de Bourgogne » (à Strasbourg, en septembre 1773) et « d’Auvergne » (à Lyon, en juillet 1774), avaient été installées par son visitator specialis, le baron von Weiler.
Du système des « Chevaliers maçons Élus-Coëns de l’Univers », la doctrine demeure, puisqu’elle justifie le principe même de « Réforme » d’une initiation maçonnique jugée « apocryphe », car ignorante de ces sources. Elle se décline selon la pensée des premiers Pères, d’Origène et de la gnose alexandrine, mais à distance des décisions conciliaires plus tardives, en une vision ontologique :
Dans celle-ci, Dieu émane, avant le commencement des temps, dans l’immensité céleste et de sa propre substance, des êtres spirituels. En châtiment de la révolte de certains d’entre-eux, il préside à la création d’un monde matériel, afin que ce confinement empêche le mal de progresser. Adam est ensuite émané par l’Éternel, esprit pur et immatériel, corps de gloire dépourvu d’enveloppe corporelle, afin de travailler à la réconciliation des esprits ténébreux enfermés dans la matière mais, loin de répondre à ces vœux, pactise avec ceux qui l’illusionnent sur ses propres capacités d’engendrement. Le drame métaphysique initial s’en trouve donc considérablement amplifié, et notre père commun – et toute sa postérité – à son tour projeté dans une enveloppe charnelle, impure et ténébreuse, vouée à la dégradation et à la mort. Et c’est dans le court intervalle de cette triste situation, que se situe la possibilité d’une « réconciliation » à laquelle il convient d’œuvrer.
L’exigeante ascèse des « Élus-Coëns » l’envisage sur un mode théurgique, y convoquant le secours des esprits intermédiaires, car ignorant les perspectives de la théologie sacrificielle du sacerdoce chrétien.
Dans une perspective christianisée, portée par Louis-Claude de Saint-Martin (1743-1803), la Réconciliation a été obtenue par la capacité rédemptrice du sacrifice de la Croix, effaçant les conséquences judiciaires du péché – bien que formellement, l’ensemble du composé matériel, et l’enveloppe charnelle en particulier, demeurent soumis à la loi de création, de dégradation, de corruption et de mort.
Les « leçons de Lyon », et les Convents fondateurs, vont s’inscrire dans ce climat, écartant la théurgie pour ne conserver que le corpus théorique de la doctrine, toutefois approfondi et précisé sur les questions de la sainte Trinité et d’une christologie exacte. Elles en constituent le levier, en phase avec l’environnement augustinien de Jean-Baptiste Willermoz[1], conscient et imprégné de la nécessité de la Grâce, dans l’attente de la réception des lumières de l’Esprit.
La Chevalerie céleste[2] témoigne, et enseigne, cette orientation ontologique, engageant l’être, journellement, dans une vie « selon l’esprit. » Dans le renoncement, le « saint abandon », des facultés dégradées et des industries illusoires.
Elle engage, par ses vœux, au « retour à la dialectique initiale, afin de devenir par Grâce, ce que Dieu est par nature. Cet enseignement est au cœur de la perspective spirituelle du Régime Écossais Rectifié, qui est ce jeudi saint de la célébration de la première cène eucharistique, où se dévoile l’essence du sacerdoce nouveau & éternel par le divin Réparateur, et à laquelle nous participons, pour pénétrer, à sa suite, dans l’intimité du rite, afin d’être Un, comme lui et le père sont Un. Deponens aliena, ascendit unus. » (Marseille, le 18 mars 2016)
Une seconde communication, portant sur les aspects fondamentaux de ce « christianisme transcendant » véhiculé par la pensée willermozienne, se tiendra le 30 avril 2016 à Montredon.
Seront présentes à cette manifestation, les éditions La Pierre Philosophale
A revoir également, sur ces thématiques :
[1] Il conviendra notamment, sur cette question, de se rapporter à l’ouvrage de J.-M. Vivenza, La doctrine de la réintégration des êtres, Editions la Pierre philosophale, 2nde édition (février 2013), Appendice VI, « Jean-Baptiste Willermoz, l’augustinisme et le jansénisme », pp. 220-232 : a) L’augustinisme de Willermoz ; b) Le climat spirituel du Concile de Trente ; C) Le pessimisme augustinien à l’égard du monde et de la chair ; d) Le jansénisme à Lyon ; e) Le catholicisme augustinien de Willermoz.
[2] « Les Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte : un Ordre de Chevalerie selon l’Esprit », i.o. A Crucis Mysterio, in Les Cahiers Verts, n° 6, année 2011.
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